Aled Edwards

Consortium de génomique structurelle

Toronto, ON

Secteur d'Impact

Éducation

Santé & Bien-Être

Science & Technologie

LA PANDÉMIE DU CORONAVIRUS A BRISÉ LE STATUT QUO SUR LE DÉVELOPPEMENT DES MÉDICAMENTS

La science ouverte — le partage gratuit de la recherche scientifique, sans le poids des brevets et des silos — offre un modèle nouveau et meilleur.


Le Fellow Ashoka canadien, Dr Aled Edwards, fondateur du Structural Genomics Consortium (SGC), crée un plan ouvert de découverte de médicaments pour aider à lutter contre le COVID-19 et à prévenir la prochaine pandémie mondiale.

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De concurrents à collaborateurs

Dr. Aled Edwards conduit le mouvement du libre accès dans le domaine médical – férocement compétitif – dans le but que la recherche sur le génome humain, et les traitements médicaux qui pourraient en découler, soient menée plus rapidement et plus efficacement.

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Accélérer les découvertes
pour révolutionner la santé humaine.

La recherche sur le génome humain pourrait avoir des effets révolutionnaires sur les découvertes médicales. Avec entre leurs mains le code génétique du corps humain, les chercheurs peuvent concevoir de nouveaux remèdes ciblés contre les maladies les plus courantes. En plus, ces traitements sont souvent plus efficaces et provoquent moins d’effets secondaires.

Toutefois, en dépit des nombreux scientifiques motivés par le potentiel énorme de la recherche sur le génome, la compétition ralentit le processus. La culture hyper-concurrentielle en recherche médicale et en découverte de nouveaux médicaments conduit souvent à un dédoublement d’efforts. Une véritable perte de temps et d’argent, deux précieuses ressources.

Aled Edwards, chercheur biomédical à l’Université de Toronto, entretenait une vision totalement différente de la recherche, ce qui l’a poussé à fonder, en 2004, le Consortium de génomique structurelle (CGS) dans le but de révolutionner le processus de découverte des médicaments, s’étant lassé des modèles à forte bureaucratie et des modèles de financement international qui, ultimement, nuisent aux travaux en laboratoire.

L’innovation radicale du Consortium ? Aucun brevet. Le Consortium est un partenariat public-privé sans but lucratif entre chercheurs, sociétés pharmaceutiques et différents paliers de gouvernement. Pourquoi quiconque, surtout les entreprises pharmaceutiques, renoncerait-il à l’obtention d’un brevet ? Aled est la preuve même que le modèle collaboratif est plus profitable : les sociétés ont accès plus rapidement à la recherche scientifique fondamentale et gagnent en efficience dans la mise au point de médicaments ciblés.

La culture de libre accès du CGS maximise l’incidence de la recherche en permettant la mise en commun de documents et d’idées sans restriction quelconque, réduisant ainsi le dédoublement des travaux et permettant de tirer le maximum de chaque dollar reçu en financement — au bout du compte, on accélère les découvertes prometteuses et fixe un cadre qui pourrait rendre l’accès à la médicamentation plus accessible et abordable pour tous.

À l’heure actuelle, le CGS publie sous le format ouvert la structure de plus de 1 300 protéines, qui pourraient révolutionner la découverte de nouveaux traitements pour le diabète, le cancer, l’obésité et les troubles psychiatriques. Le CGS a recueilli près de 200 millions de dollars auprès d’investisseurs privés. En outre, cette méthode permettant de gagner en efficience dans la recherche, elle libère ainsi une capacité scientifique qui peut alors se pencher sur des domaines moins connus de la génomique humaine.

Ces derniers temps, Aled met à l’essai un nouveau modèle d’activité de découverte de médicaments qui aurait l’abordabilité pour principale raison d’être. Il a fondé deux entreprises de recherche « ouverte » de médicaments afin de tester son nouveau modèle : la première, Medicines for Kids (M4K) Pharma, travaille sur un nouveau traitement pour les enfants atteints d’un cancer du cerveau mortel, le gliome pontique intrinsèque diffus. La deuxième, Medicines for Neurodegeneration (M4ND) Pharma, s’intéresse surtout à la maladie de Parkinson, à la sclérose latérale amyotrophique (SLA) et à l’Alzheimer. Les deux entreprises sont la propriété entière d’un organisme de bienfaisance canadien, l’Agora Open Science Trust. L’organisme a pour mission de garantir que tout nouveau médicament mis en marché résultant des activités de M4K or M4ND sera offert à un prix aussi bas que possible pour que tous puissent se le procurer.

Aled est à la tête d’un virage fondamental de la recherche médicale, un changement de cap qui pourrait aplanir les obstacles entravant l’offre de traitements à la fois accessibles et abordables à l’échelle mondiale.

Faits Saillants du Réseau

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La science ouverte est le seul modèle viable pour vaincre cette pandémie – et pour empêcher la prochaine.

Le Dr Aled Edwards pousse un mouvement vers la découverte de médicaments en libre accès, au Canada et à l’étranger. Le partage des connaissances scientifiques, sans brevet, en temps réel, explique le scientifique de l’Université de Toronto, est le seul moyen durable de créer des vaccins et des traitements efficaces pour les maladies qui ravagent l’humanité. Et c’est le seul moyen de prévenir la prochaine pandémie mondiale.

Plus récemment, Aled a formé Viral Interruption Medicines Initiative (VIMI), une société sans but lucratif de découverte de médicaments dont la mission est de développer les traitements médicamenteux nécessaires d’urgence pour lutter contre le COVID-19 et la prochaine pandémie.

Nous avons rencontré Aled pour parler de son travail, de l’impact du nouveau coronavirus et de ce que nous devons faire maintenant pour accélérer considérablement le développement de médicaments efficaces et abordables pour tout le monde.
Quelle est la principale raison pour laquelle il faut si longtemps pour développer de nouveaux médicaments ?

Eh bien, contrairement à la croyance populaire, ce n’est pas un manque d’argent et ce n’est pas un manque de temps. À l’échelle mondiale, nous dépensons des centaines de milliards de dollars chaque année pour la découverte de médicaments. Au Canada, ce chiffre est de 300 millions de dollars. Nous travaillons à développer une compréhension moléculaire de la maladie de Parkinson depuis 1808 et d’Alzheimer depuis 1806, et nous n’en avons toujours pas.

Alors, qu’est-ce qui nous retient ? C’est l’acceptation tacite de la société que la médecine n’est pas un droit humain fondamental mais un produit commercial – et nous traitons donc le développement de médicaments comme une produit d’affaires, pas comme un bien social.

Quelles sont les retombées ?

Cela signifie que nous accumulons des connaissances au lieu de les partager, car les scientifiques, les universités et les sociétés pharmaceutiques sont incités à le faire. Et cette thésaurisation – à travers les brevets, le secret et la réticence à publier des recherches, y compris les résultats d’expériences ratées – inhibe l’innovation et fait double emploi. Cela signifie que les scientifiques et les compagnies pharmaceutiques consacrent la R&D aux maladies pour lesquelles il existe des marchés, plutôt qu’aux maladies – par exemple, une future pandémie – pour lesquelles il existe un besoin.

Et cela signifie que lorsqu’un nouveau médicament arrive enfin sur le marché, son prix est astronomique, ce qui le rend inaccessible à la grande majorité des gens dans le monde.

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Comment la pandémie de coronavirus a-t-elle permis de mieux cerner ces apprentissages ?

Lorsque COVID-19 a frappé, la communauté scientifique mondiale a immédiatement décidé : «Partageons nos recherches et nos connaissances afin de comprendre ce virus et de créer un vaccin, un traitement.» Toutes les raisons présumées que nous ne pouvions pas partager se sont soudain évaporées. Il est devenu clair que les vraies raisons pour lesquelles nous n’avons pas partagé davantage sont en réalité artificiellement construites par la société. Les gens ne voulaient pas changer le système.

Et pourquoi les gens veulent-ils changer le système maintenant ? Parce que nous sommes en crise. Mais le cancer chez les enfants est également une crise. La démence est également une crise. Les maladies tropicales qui touchent principalement les populations des pays en développement sont également des crises. De futures pandémies que nous pouvons prédire maintenant, tout comme nous avions prédit COVID-19 seront des crises.

Et j’espère donc que cette capacité à partager se poursuivra au-delà de ce moment et de ce virus actuel, et s’incarnera dans un univers radicalement nouveau dans notre façon de penser et de financer le développement de nouveaux médicaments. C’est le travail auquel je me consacre.

À quoi ressemble ce nouvel univers ?

Dans ce nouvel univers – et il est tout à fait possible de le créer – nous devons partir du principe que l’accès à la médecine est un droit humain fondamental et que la recherche scientifique et médicale est avant tout un bien sociétal plutôt qu’économique.

Sur le plan pratique, cela signifie adopter des principes de science ouverte : partager la recherche et les connaissances, en temps réel, sans brevet. Par exemple, au Structural Genomics Consortium [la découverte de médicaments en science ouverte que j’ai fondée en 2004 pour étudier le génome humain], nous avons publié les structures de plus de 1 300 protéines. Dans le cadre de l’organisation caritative Agora Open Science Trust, j’ai fondé deux sociétés de découverte de médicaments à science ouverte consacrées au développement de médicaments pour des conditions trop complexes ou trop rares – comme la démence ou un cancer du cerveau des enfants très mortel – pour que les sociétés pharmaceutiques y investissent.

La science ouverte accélère les découvertes. Disons que j’ai une idée d’un médicament contre la maladie d’Alzheimer. Peut-être que cela ne fonctionne pas, mais lorsque nous faisons l’expérience de manière ouverte, nous pouvons voir pourquoi cela ne fonctionne pas. Ensuite, d’autres scientifiques et d’autres laboratoires dans d’autres pays n’ont pas à faire la même expérience – et l’argent qui aurait été utilisé pour concourir sur une idée peut maintenant être réparti sur 10 idées. Nous apprenons de tous les acteurs impliqués. Et, en fin de compte, le prix du médicament reflète un échec plutôt que 10.

En quoi consiste ton dernier projet ?

Nous venons de lancer VIMI (Viral Interruption Medicines Initiative), une organisation à but non lucratif dont la mission est de développer les traitements médicamenteux nécessaires d’urgence pour lutter contre le COVID 19 et la prochaine pandémie. VIMI vise à développer 10 médicaments prêts à être testés dans les essais cliniques dès la prochaine pandémie. Nous avons conclu des partenariats avec des universités aux États-Unis et en Europe, et avec une filiale à but non lucratif appelée READDI (Rapidly Emerging Antiviral Drug Development Initiative), qui a été créée pour faciliter la collecte de fonds auprès de philanthropes américains.

Nous fonctionnerons selon des principes scientifiques ouverts extrêmes : partage de la recherche, pas de brevets, sans but lucratif.

Ce n’est pas une nouvelle idée. Nous copions sans honte d’autres sociétés pharmaceutiques ouvertes à succès – comme DNDi, la Drugs for Neglected Diseases Initiative ou la campagne d’accès de Médecins sans frontières, qui sont des modèles de découverte de médicaments à succès et à science ouverte pour les pays en développement.

Nous avons besoin d’un financement catalytique de la part des gouvernements, des fondations et d’autres partenaires pour en faire une préoccupation permanente.

Est-ce que la science ouverte est un modèle d’affaires viable ?

Oui, une des options viables, par exemple, consiste à offrir aux sociétés pharmaceutiques une licence pour produire les nouveaux médicaments à un profit raisonnable par rapport au coût.

Les opposants soutiendront qu’un modèle de science ouverte ne fonctionne que pour les maladies peu étudiées ou les maladies des pays en développement, car il n’y a clairement aucun moyen rationnel pour un investisseur d’investir dans celles-ci. Mais je soutiens qu’actuellement le marché ne fonctionne pour aucune maladie. Cela ne fonctionne pas pour Alzheimer, Parkinson, le cancer pédiatrique, et je peux continuer.

Et – comme nous pouvons tou.te.s le voir en ce moment – le système actuel ne fonctionne pas en cas de pandémie. Lorsque nous nous réveillerons du COVID-19, nous nous rendrons compte que des millions de personnes sont mortes dans le monde en développement de ce virus. Des millions. Et ce que les pays pauvres ne peuvent pas se permettre, c’est ce que le monde ne peut pas se permettre. Si le Malawi, par exemple, ne supprime pas sa menace au COVID, le virus va revenir. Nous devons penser à l’éradication mondiale et non locale. Et nous devons le faire maintenant.